humeurs

Un an

” Tu n’es plus là où tu étais mais tu es partout là où je suis”

 Je n’ai jamais vraiment été forte en écriture mais aujourd’hui plus que jamais j’ai besoin de me confier à vous, j’ai besoin de vous. Vous qui me suivez depuis un mois peut-être, un an, deux ans ou encore trois ans. Vous qui avez vécu de nombreuses choses avec moi, dont la chose la plus dure de ma vie, la perte de mon grand-frère il y a un an, le 19 février 2017.
Je vais donc écrire, juste écrire comme ça vient, sachez il n’y aura aucun “ordre” dans mon propos, cela peut être écrit un peu n’importe comment mais cela sort directement de mon cœur et je pense que c’est le principal.
En ce 20 février 2018 j’ai besoin de rendre hommage à mon grand-frère en écrivant ces quelques lignes, ces lignes que j’ai écrit lors des moments les plus durs, moments qui ont été beaucoup trop nombreux durant cette première année. Écrire est la seule chose qui arrive à quelque peu me soulager depuis qu’il est parti, j’ai sans cesse besoin de mettre des mots sur ce que je ressens et surtout de lui écrire à lui en pensant que peut être il peut lire ces mots.
 
Tu es parti, ça y est. Ce jour que je redoutais depuis le moment où j’ai compris que tu avais cette maladie est arrivé. Ce jour auquel souvent je pensais en me demandant mais comment je ferais ? est tombé. Et je dois dire que jamais je n’aurais cru qu’il arriverait si vite, après 21 années de ma vie passées avec toi.
 Un battant, voilà ce que tu as été durant ces 27 années et plus particulièrement durant les 7 dernières années de ta vie. Des années durant lesquelles jamais tu ne t’es plaint et cela malgré la douleur et la souffrance. Des années qui ont été belles mais compliquées aussi, surtout les dernières.
Je me souviens encore de cette année où pour la première fois on a failli te perdre, où nous sommes venu te voir en service de réanimation et où je n’ai pu m’empêcher de m’écrouler en te voyant dans cet état. Des tuyaux partout, de la maigreur et ce teint que je ne pourrais oublier. Et toi, fidèle à toi même, qui m’a dit : mais regarde tout va bien, je suis encore là.
Je me souviens aussi qu’après ce passage si près de la mort tu nous as dit que tu avais compris la leçon, que tu recommencerais a te soigner, à te battre contre la mucoviscidose, mais à notre plus grand désespoir tu ne l’as pas fait. Tu ne l’as pas fait parce que cette maladie t’avait déjà tué intérieurement.
Aujourd’hui encore je t’en veux, je t’en veux d’avoir arrêter tous tes soins quand tu es parti de la maison. Mais puis-je vraiment t’en vouloir ? puis-je vraiment comprendre ce que tu ressentais ? Non je ne pouvais pas et je ne pourrais jamais car je n’étais pas à ta place, je n’étais pas celle qui prenait des médicaments et des séances de kiné tous les jours depuis sa naissance, je n’étais pas celle qui faisait des pancréatites toutes les trois semaines durant près de 4 ans, qui passait de longs séjours à l’hôpital, qui ne passait pas un jour sans tousser et qui a endurer 4 dernières années insupportables.
Non moi j’étais celle qui me plaignait dès que j’avais un rhume et une toux qui duraient trop longtemps alors que toi cette toux tu te la trimballais depuis le jour où tu es né.
Tu sais Mathieu même si on te rabâchait sans cesse de prendre tes médicaments dans l’espoir qu’un jour tout aille de nouveau mieux on savait à quel point tu souffrais, on savait à quel point la vie était devenu beaucoup trop dure pour toi ces dernières années, à quel point chaque chose banale du quotidien était devenu une épreuve mais on espérait encore et toujours. L’espoir d’une greffe était présente depuis plusieurs mois et ça a été dur d’admettre qu’on ne pourra jamais savoir si cela aurait marché..

Mais ce 19 février 2017 tu n’a plus pu, tu n’as juste plus réussi à supporter tout cet acharnement, toute cette douleur qui t’empêchait de vivre comme nous. Tu ne vivais plus Mathieu, tu survivais. Tu ne mangeais plus comme nous, tu ne dormais plus comme nous, tu toussais à longueur de journée, tu faisais pancréatite sur pancréatite, tu devais te gaver d’anti-douleurs pour avoir moins mal et surtout tu ne souriais plus. Je nous revois à ce Noël 2016, te prenant en photo et te demandant avec insistance de sourire mais tu n’y arrivais tout simplement plus. Aujourd’hui quand je regarde cette photo, je comprend a quel point ce sourire était forcé, je peux voir la douleur qu’il y avait derrière celui-ci et cette photo, dès que je la vois, je m’effondre. Je m’effondre parce que c’est la dernière photo que j’ai prise de toi et encore durant ce moment tu as fait passé mon bonheur avant le tien en souriant alors que tu n’avais même plus la force de faire cela. Tu as encore une fois simplement voulu me faire plaisir et ne pas me montrer a quel point tu avais mal.
J’ai du mal à le dire mais plus les jours passent et plus je comprends que tu t’es envolé vers un monde meilleur, vers un monde ou enfin tu peux reposer en paix, ou enfin cette maladie ne te détruit plus physiquement mais aussi et surtout psychologiquement et ça c’est la seule et unique chose qui me permet aujourd’hui d’avoir moins mal. Parce que cette maladie nous a autant détruite toi que nous.

Malgré ça tu nous a laissé ici sans toi et ça il n’y a rien de plus dur.
Mais tu sais ce qui est encore plus dur, c’est que tu nous as laissé après nous avoir fait la plus belle déclaration d’amour à Noël. C’était la première fois que tu te confiais à nous de la sorte et que tu nous disais accepter l’idée de la greffe. Qu’est ce que ça nous a rendu heureux, je me rappelle des larmes de joie sur chacun de nos visages, sur celui de papa, de maman, de Nico et sur le tien, pour la première fois. Il faut que je te dise,
c’était mon plus beau cadeau, mon plus beau Noël et jamais je n’oublierais ce moment.
Depuis quelques années tu avais mis une barrière entre toi et nous et aujourd’hui plus que jamais je réalise que tu as fait cela uniquement pour nous protéger, on a eu parfois du mal à l’accepter mais on a toujours su que tu faisais ça pour notre bien, afin que ce fameux jour soit moins dur, afin que la douleur s’atténue plus rapidement sûrement. Évidemment aujourd’hui la douleur est toujours présente et elle le sera encore et toujours parce que malgré cette distance tu étais un grand frère parfait, un grand frère qui m’a protégé et tellement appris sur la vie. Un grand frère qui était là quand ça n’allait pas, un grand frère qui savait me remettre sur le droit chemin quand je m’égarais un peu trop.
Tu étais une personne tellement généreuse, compréhensible et avec un cœur énorme. Et aujourd’hui je me demande encore pourquoi ce sont les personnes les plus bienveillantes qui partent..
J’écris ce texte, les larmes aux yeux, la gorge qui se sert mais j’écris parce que je veux te rendre hommage, je veux rendre hommage au grand frère fabuleux que tu as était et que tu seras toujours. Je veux écrire tout ce que j’ai sur le cœur depuis ce 19 février, depuis ce jour où ma vie a basculé, où la vie n’a plus le même goût.
Depuis cette date quelque chose est éteint en moi. Je ne ressens plus les mêmes choses, je sais bien que je ne suis plus aussi heureuse qu’avant cette date, qu’il me manque quelque chose et qu’il me manquera toujours quelque chose. Et de se dire que rien ne pourra combler ce vide c’est juste terrible.
Tout ce que je réussis depuis cette fameuse date j’aimerais que tu le vois, j’aimerais que tu sois fier de moi parce que tu étais toujours le premier à l’être a chaque fois que je réussissais quelque chose et aujourd’hui quand cela arrive je ne peux m’empêcher de me dire que tu n’es plus là pour le voir.
Tu sais quand j’ai appris que j’avais eu ma licence de droit, la première chose que j’ai fait a été de me mettre à pleurer, mais ce n’était pas de joie comme ça aurait du l’être. J’ai pleuré parce que j’ai compris que tu ne saurais jamais que j’avais eu cette fichu licence qui m’avait posé tant de problèmes et dieu sait que tu aurais été tellement fier de moi.
C’est ça le plus dur, c’est de se dire que tu ne seras plus présent durant tous les moments importants de ma vie.
J’aurais aimé que tu sois à mes côtés pour mon mariage, que tu puisses voir mes enfants, que tu puisses voir comment j’affrontais les épreuves de la vie et que tu puisses aussi voir a quel point j’arrivais à être heureuse et épanouie durant de rares moments.
 Tous les jours j’essaye de me dire que tu es mieux là haut, que la greffe n’aurait pas pu tout arranger, que des problèmes de santé auraient persisté malgré elle, que maintenant tu ne souffres plus mais je dois t’avouer quelque chose, je suis égoïste et j’aurais aimé que tu restes auprès de nous, toute la vie. Mais j’aurais aussi et surtout aimé qu’un jour tu n’aies plus à prendre tous ces médicaments, tous ces anti douleurs que ces derniers mois tu avalais tous les jours, j’aurais aimé que tu puisses de nouveau dormir normalement, que tu n’aies plus besoin d’assistance respiratoire mais aujourd’hui je comprend que cela n’était qu’illusion, j’étais bien trop rêveuse. Aujourd’hui je ne ferais plus de vœu quand je soufflerais mes bougies parce que je sais que le vœu que je faisais à chacun de mes anniversaires depuis 21 ans ne se réalisera jamais.
Ce soir pour penser encore plus à toi et à la personne formidable que tu étais, je me replonge dans les mots que les personnes importantes de ta vie nous ont laissé.
” A mon ami de toujours, un garçon plein de talent, tu as marqué ma vie comme personne. Je pense à toi” 
“Ton court passage sur la terre aura suffit à remplir nos cœurs de ta gentillesse, de ton attention, de ton esprit. Tu nous laisses avec des souvenirs merveilleux, ceux d’un fils aimant, d’un frère qui aimait rire.” 
“Certaines rencontres dans la vie nous marquent, même si elles sont éphémères. Il ne s’est pas rendu compte à quel point il m’a apaisé et aidé. En résumé, Mathieu a été une belle rencontre. Je ne crois pas qu’il ait mesuré l’impact positif qu’il a eu dans ma vie, alors j’en profite pour vous dire merci”
 

Pour finir je dois te faire un dernier aveu, j’ai des regrets, des regrets de ne pas avoir pu te dire au revoir car j’aurais tellement aimé être là, à tes cotés, à te tenir la main pour ne pas que tu partes tout seul et pour te dire qu’un jour on se reverra, des regrets aussi de ne pas t’avoir assez dit je t’aime alors aujourd’hui je veux te le dire, je t’aime Mathieu, tellement, je te remercie pour tout ce que tu as fait pour moi, pour tout l’amour que tu m’as apporté, pour ce grand frère que tu as été et sache que jamais au grand jamais je ne t’oublierais. La mort n’arrête pas l’amour. 

Ta petite sœur.
  
J’ai écrit chaque ligne de ce texte en me demandant si je faisais le bon choix de me dévoiler comme cela, à vous, personnes qui me connaissent plus ou moins. Certaines personnes trouveront ça inconcevable de publier des pensées si intimes et ne comprendront pas mon geste et je peux comprendre, mais si je l’ai fait c’est parce que j’ai à mon tour besoin de vous, j’ai besoin que vous m’aidiez à me battre contre cette maladie. J’ai besoin que vous soyez à mes cotés pour soutenir toutes les personnes atteintes de la mucoviscidose. 
Pour rendre hommage à Mathieu, rendre hommage à toutes les autres personnes parties trop tôt à cause de cette maladie et pour soutenir les personnes atteintes et leurs familles j’ai décidé de lancer un grand appel aux dons. Dons qui iront à l’association Gregory Lemarchal dont les principales missions sont l’accompagnement des patients et le financement de la recherche. 
Vous avez été là pour moi à de nombreux moments et j’espère de tout mon cœur que vous serez également présents pour ce projet sur lequel je suis depuis pas mal de temps et dans lequel j’ai mis toute ma peine mais aussi tout mon amour. 
Alors si vous voulez vous unir à moi, c’est ici. Sachez qu’absolument tous les dons comptent et m’iront droit au cœur.
Merci à vous, merci pour tout. 

Pour vous rendre sur la collecte c’est ICI

En hommage à mon grand-frère.

7 Comments

  • Anaïs
    20 février 2018 at 21 h 39 min

    Bravo Camille pour ce texte si touchant. Je ne te connaissais pas comme ça, pas si intimement. J'ai pas pu m'empêcher de pleurer… justement parce que tu l'écris comme j'imagine, avec la peine que vous avez pu vivre et le manque que vous vivez encore. Je n'ai pas les mots pour te réconforter… mais je ne peux que te féliciter. Bravo pour ce projet, pour ton courage, pour ta force. <3

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  • Anonyme
    20 février 2018 at 22 h 01 min

    Je suis désolée mais je n'ai pas pu lire ton texte entièrement tellement il m'a ému. Ton article est magnifique et j'espère du fond du coeur qu'il t'a aidé.
    Tu es une personne tellement forte, je te souhaite malgré l'absence de ton grand frère le plus de bonheur possible aux côtés de tes proches et surtout reste comme tu es, une fille courageuse, simple attachante à laquelle on ne peut que s'attacher.
    Je t'embrasse,
    Weronika

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  • Alix
    20 février 2018 at 22 h 01 min

    Bonsoir Camille,

    Mon Dieu que c'est beau et touchant ce que tu as écris. Je pense que, toute ta vie, tu auras la présence de ton frère qui t'accompagneras avec bienveillance et amour. Les personnes qui nous quittent trop tôt restent cependant avec nous dans nos coeurs et dans nos pensées. Ton projet est une initiative qui je l'espère aura du succès, c'est la plus belle des choses à faire. J'espère moi aussi qu'un beau jour la recherche trouvera enfin la réponse pour toutes ces personnes qui souffrent.

    "Il y a des souvenirs qui ne demandent pas la mémoire, on les porte en soi comme un parfum qui vous colle à la peau, tant les notes de coeur et de fond ont enivré l'âme d'une empreinte olfactive à jamais"

    Alix

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  • Unknown
    20 février 2018 at 22 h 18 min

    Bravo et merci !
    Ce texte est très émouvant et m'as fait fondre en larme !je ne peut pas imaginer le courage qu'il t'as fallut pour l'ecrire ! J'ai été transporte pendant un instant dans la douleur que tu as ressenti ! Ça fait mal mais ça aide à ouvrir les yeux ! J'ai compris que je n'ai jamais vraiment souffert et qu'il y a tellement plus douloureux ! Ton frère et un exemple de courage et de force ! Ton hommage m'a marqué a jamais et je vais partger ta cagotte au maximum !
    Tu es une magnifique personne ��
    Noélie

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  • THUAU Geneviève
    20 février 2018 at 23 h 04 min

    Merci Camille.Un hommage très émouvant Bisous

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  • Anonyme
    20 février 2018 at 23 h 45 min

    Camille ton texte est plus que magique, tu l'as écris avec ton cœur, ton amour pour ton frère. Je te trouve tellement courageuse mais surtout tellement forte d'avoir mené ce projet, d'avoir pu te dévoiler comme tu l'as fait ! Bravo et merci

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  • Mme Bavarde
    22 février 2018 at 11 h 23 min

    Ce texte est si beau et saisissant. Évidemment j'ai pleuré en le lisant, tes mots si justes et cette déclaration à ton grand frère. J'ai moi aussi un grand frère, qui s'appelle Matthieu et je n'ose imaginer s'il devait "partir". Je n'ose imaginer ta douleur et en même temps comme tu le dis si bien, il est certainement libéré du poids de la maladie là où il est aujourd'hui. Bravo ma Camille, bravo d'avoir réussi à poser ces mots, et bravo pour cette idée de cagnotte. Je pense énormément à toi.
    Je t'embrasse ❤
    Emilie

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